Après s'être déclarés candidats à l'expérimentation en décembre 2007, le Cap-Vert et la Moldavie sont les deux premiers pays à bénéficier de la nouvelle politique européenne en matière de migration, tandis que le Sénégal et la Géorgie devraient d'ici à un an devenir les prochains candidats pour ces nouveaux partenariats.
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Quelques jours après l'entretien qu'ont eu Pedro Pires et son homologue Nicolas Sarkozy à l'Elysée, c'est en marge du conseil "justice et affaires intérieures" que l'Union Européenne et le Cap-Vert ont signé le 5 juin au Luxembourg une déclaration commune jetant les bases d'un nouveau partenariat entre l'UE et l'archipel dans le domaine de la mobilité. Cette déclaration a été approuvée à Praia en Conseil des Ministres. On rappellera qu'en novembre dernier, le Cap-Vert avait obtenu le statut de partenaire spécial auprès de l'Europe des 27, statut qu'il restait à définir par des projets concrets.
IMMIGRATION: NOUVELLE APPROCHEAssociée au concept de
migration circulaire, au coeur du nouveau dispositif imaginé en 2007 par la Commission Européenne pour endiguer l'immigration clandestine tout en s'assurant d'une main d'oeuvre étrangère, la
mobilité vise à créer des partenariats avec des pays à forte émigration.
Si la mobilité définit ou facilite les conditions d'entrée d'une certaine catégorie de migrants, la
migration circulaire encadre et favorise leur retour après plusieurs années dans le pays d'origine, officiellement pour éviter à ces pays partenaires le phénomène de fuite des cerveaux. Enfin, le dispositif s'accompagne toujours d'autres mesures visant à améliorer la lutte contre l'
immigration illégale.
MOBILITÉLe Cap-Vert a été retenu pour expérimenter l'un de ces tous premiers partenariats. Car il s'agit bien d'une phase pilote, la déclaration du 5 juin n'ayant été signée que par les pays concernés: la France, l'Espagne, le Portugal et le Luxembourg, pays accueillant une forte diaspora capverdienne (tout comme les Pays-Bas et l'Italie).
Dans ces quatre pays retenus, l'accord prévoit de faciliter l'entrée des ressortissants capverdiens pour des séjours de courte durée, en assouplissant les conditions d'admission. Au même titre, Praia devrait prochainement accueillir un centre commun de traitement des demandes de tels visas, et une nouvelle structure devra favoriser l'encadrement et l'information des migrants.
C'est par exemple en jumelant les services d'emploi des quatre pays à celui du Cap-Vert que les ressortissants capverdiens devraient bénéficier d'une meilleure information sur les opportunités de travail en Europe. Enfin, un programme d'attribution de bourses d'étude dans les universités des quatre pays devrait prochainement être mis en place, tandis que des crédits seront dégagés pour favoriser la formation et l'apprentissage linguistique des candidats à l'entrée en Europe.
MIGRATION CIRCULAIRE Autre composante du nouveau dispositif européen, la
migration circulaire est aussi abordée dans le partenariat pilote: il s'agit de favoriser le retour au pays des migrants, en développant des programmes de réinsertion par l'emploi, ou de permettre leur sortie de l'espace européen pendant quelques mois, le temps de créer des activités dans l'archipel ou à l'étranger sans courir le risque de ne plus pouvoir rentrer en Europe.
Afin de faciliter la création de richesse dans l'archipel, le partenariat cible aussi les transferts financiers réalisés par la diaspora à destination des familles restées au Cap-Vert, des transferts qui ont toujours contribué pour une part très significative au PIB du pays. Les émigrants se sont toujours plaints des importantes commissions prélevées par les établissements financiers sur ces transferts.
IMMIGRATION ILLÉGALEToutes ces mesures de facilitation de l'entrée et du séjour en Europe s'accompagnent d'un volet plus répressif, avec pour objectif affiché de lutter contre l'immigration clandestine. Si le Cap-Vert n'est pas un pays réputé pour être un Etat pourvoyeur d'illégaux, il présente en revanche toutes les caractéristiques d'un pays qui pourrait servir l'immigration clandestine et les réseaux de trafic d'êtres humains.
Contrôlant très difficilement son immense espace maritime, proche du continent africain voisin, il a vu arriver ces trois dernières années de nombreux candidats à l'émigration clandestine vers l'Europe, par exemple à bord de pirogues cherchant à rejoindre les Canaries plus au nord. Des événements plus tragiques ont ému le pays, comme la découverte de barques pleines de cadavres ayant échoué dans leur tentative d'atteindre l'archipel espagnol.

Le partenariat définit donc un ensemble de mesures visant à une meilleure efficacité dans le contrôle aux frontières, par exemple en renforçant les capacités de surveillance maritime, avec un recours important aux services de l'Agence européenne Frontex.
D'un autre côté, l'Europe financera un programme d'amélioration des documents d'identité émis au Cap-Vert, le système actuel étant jugé trop peu sûr, notamment pour envisager à court terme l'idée d'une entrée en Europe sans visa.
Enfin, les pays accompagneront le Cap-Vert dans l'harmonisation de son système d'asile aux normes internationales.
DIALOGUESi la déclaration politique signée au Luxembourg intègre déjà les mesures annoncées ci-dessus, elle n'en reste pas moins ouverte: d'autres pays européens pourront éventuellement s'y associer, d'autres agences européennes pourront être impliquées (autres que la Frontex et l'agence communautaire du Fonds Européen pour la Formation aujourd'hui parties prenantes du partenariat), notamment si les pays signataires venaient à se concerter pour lancer de nouvelles initiatives.
Crédits photo: Ministère des Affaires Etrangères
07 Juin 2008